Prix International de la Ville de Genève 2001
Le Minuscule Mousquetaire,
l'académie des Beaux-Arts, Dargaud,
dessin et scénario de Joann Sfar
 |
 |
 |
 |
| Le Minuscule
Mousquetaire, planche 5, stylo bille et stylo feutre sur papier |
Le Minuscule
Mousquetaire, planche 20, crayonné stylo feutre et encre de Chine sur papier |
Le Minuscule
Mousquetaire, planche 20, planche définitive, encre de Chine sur papier |
Le Minuscule
Mousquetaire, planche 41, mise en couleur par informatique |
A la manière de Chérie, j'ai rétréci les gosses! un Mousquetaire à la tête de Pétrus Barbygère, qui se voyait bien abandonner quelques bourrelets par l'effet d'une potion amoindrissante, se retrouve minuscule. En un monde bien trop petit pour ses escarmouches, il va tomber sur une doctoresse aux seins triomphants qui officie de préférence au lit plutôt que sur canapé. Et qui va lui débiter un traumatisant éloge de la mort humaine: "Tout le monde vient vous visiter comme à l'église. [...] Les gens que vous aimez doivent vous langer comme un bébé".
Dans cette France minuscule, quatrième dimension de l'âme humaine, le gaillard, pour gagner quelques sous, va exposer atouts et atours à l'Académie des Beaux Arts. L'occasion pour l'auteur de disserter sur sa passion du dessin, et de panthéoniser un professeur descriptant les testicules de son modèle: " Une paire de couilles, c'est un sac que l'océan a rejeté sur une grève battue par les vents. [...] Et c'est peut-être dans ce constat de l'agression faite aux choses par les forces de Nature que réside la beauté... une beauté désespérée".
Peu après, il tombe sur un amoureux éconduit, et de repartir pour des aventures crypto-hindoues plus conformes à son statut, chevauchant l'un sur un dogue de Bordeaux, l'autre sur un mâtin napolitain; tels deux soudards en vadrouille ils partent en quête de la belle Eulalie qui se tape un drôle de singe pour mari, dénonçant et ricanant au passage sur le rituel du duel.
C'est la (qué) quête d'un homme qui ne voit les problèmes que là où sont les siens, dans un monde qui serait materné par les femmes.
Imagination débordante, verve rabelaisienne du texte et bons mots qui ressortent comme des truffes dans un champ de patates, des dessins qui semblent autant de fantasmagories, Joann Sfar est un maître du conte qui arrive à mêler en bandes dessinées la geste du roman de cape et d'épée, le fantastique rapiécé d'un Tim Burton, la joliesse d'un Lewis Carroll. Un digne disciple de l'elficologue Pierre Dubois.
Maxime Pegatoquet